fluorescent adolescent
« Tu es… quoi ?! Est-ce que tu te rends compte de ce que tu es en train de me dire ? »
« Je suis gay, maman ! Lesbienne ! Homo ! »
« Mais enfin, Nikki ! Si c’est une blague, elle n’est pas drôle. »
« Je suis très sérieuse, même s’il n’y a pas de quoi en faire tout un plat… »
« Mais… non ! Ce n’est pas possible ! Je ne t’ai pas élevé comme ça… »
« Ça n’a rien à voir avec toi, maman. La seule chose que j’ai besoin d’entendre là maintenant tout de suite, c’est que tu m’aimes pour ce que je suis… »
« Bien sûr que je t’aime. Mais ce n’est pas la vie que j’aurais voulu pour toi. Ecoute, je pense que tu es bien trop jeune pour savoir ce que tu aimes dans la vie, tu n’as encore rien fait, rien expérimenté. Tu ne peux pas savoir. »
Ainsi s’acheva le coming out de Nikita. Sa mère avait simplement décidé que sa fille n’était pas homosexuelle et entra dès ce jour dans un profond déni. Il se creusa presque immédiatement un fossé entre la jolie blonde et sa mère… Portant, les choses n’avaient pas toujours été ainsi. Au contraire ! Nikita était fille unique, et avait toujours été très proche de sa mère, surtout après que son père les ait quittées alors qu’elle était encore une gamine. Pendant longtemps, elles s’étaient serrées les coudes toutes les deux. Et puis Nikita avait grandi et s’était découverte. Elle était lesbienne, c’était comme ça, une partie d’elle l’avait toujours su au fond. Elle n’avait jamais rien caché à sa mère et elle ne comptait pas commencer aujourd’hui, d’où son intention de lui faire son coming out assez tôt. Trop tôt, peut être, au vu de sa réaction… Mais qu’importe, c’était fait, et la blondinette sentait qu’un poids avait cessé de peser sur ses épaules. Et puis, le soutien que sa mère ne lui apporta pas, elle le trouva chez son meilleur ami Elijah. Rapidement, il devint tout pour elle : son meilleur ami, son frère, un fragment de son âme. C’est bien simple, ils étaient inséparables et avaient noué une amitié très fusionnelle. C’est notamment grâce à lui que Nikita s’est toujours assumée en tant qu’homosexuelle, en toutes circonstances. Bien sûr, elle n’échappa pas aux insultes et fut la victime de quelques discriminations au cours de sa jeunesse, mais elle a toujours estimé que cela lui avait forgé un caractère, une carapace à l’épreuve des balles, sous laquelle la jeune femme était en sécurité. Elle ne se gênait ainsi pas pour profiter de sa vie comme elle l’entendait, tout en travaillant d’arrache pied – il faut dire que la petite avait toujours eu une tête bien pleine. Son diplôme en poche, elle se lança donc dans des études de médecine, ce qui ne fut pas de tout repos : 3 ans de fac, 3 ans d’externat, et l’internat qui arrivait à grand pas… C’est pendant sa dernière année d’externat qu’elle tomba follement amoureuse de l’une de ses collègues, Iris… qui était malheureusement totalement hétérosexuelle. Mais que voulez vous, le cœur a ses raisons que la raison ignore. Elle a souvent essayé de réprimer ses sentiments, mais c’est difficile d’oublier ce que l’on ressent pour une personne lorsqu’on la voit tous les jours dans le monde professionnel…
bleed it out
L’externat de la jolie blonde se termina sans embuches. Tout comme celui d’Iris. Prochaine étape : l’internat ! Toutes deux avaient pour ambition de devenir chirurgiennes et travaillaient donc souvent ensemble, au boulot comme en dehors, pour parfaire leur apprentissage. Mais Nikita n’en pouvait plus. Elle n’avait jamais su réprimer autant ses émotions, et elle avait besoin que ça sorte, pour enfin être fixée et pouvoir passer à autre chose. Cette fixation n’avait que trop duré, elle devait révéler ses sentiments à Iris. Nikita n’avait pourtant jamais eu le moindre sens du timing… c’est probablement pour ça qu’elle l’annonça à Iris au cours d’une garde qui durait depuis déjà 18h, à 3h du matin, en plein milieu d’un couleur lugubre de l’hôpital. La réaction de l’interne fut aussi glaciale que définitive : Iris lui ordonna sèchement de ne plus jamais l’approcher. Ce fut une véritable claque pour la jeune femme, qui eut du mal à retenir une grosse crise de sanglots et alla se réfugier dans le placard à fournitures le plus proche, le temps de se calmer. Quelques minutes plus tard, elle entendit la porte s’ouvrir doucement… Etait-ce Iris qui revenait ? Avait-elle changé d’avis ? Un sourire plein d’espoir commençait à naitre au coin de ses lèvres… mais n’eut pas le temps de s’étirer. Un homme venait d’entrer dans le placard. Un de ses patients, qu’elle connaissait bien, d’autant plus qu’il ne s’agissait pas d’un patient ordinaire : schizophrène, il était persuadé d’être en communication permanente avec Dieu.
« Monsieur Dominović, vous ne devriez pas être là, c’est réservé au personnel. Je vais vous ramener dans votre chambre. »
« Je vous ai entendu, dans le couloir. » Il l’attrapa fermement par le bras.
« Monsieur Dominović, vous allez me lâcher immédiatement ! Vous me faites mal ! »
« Dieu m’a envoyé dans cet hopital pour une raison, il me l’a dit. Il a de grands plans pour moi, vous savez. J’ai enfin compris quelle est ma mission. »
« Nous en avons déjà parlé, vous êtes schizophrène monsieur Dominović, Dieu ne vous parle pas, vous êtes malade ! Lâchez moi maintenant, calmez vous ! »
« Je dois accomplir mon devoir. Je dois ramener les brebis égarées dans le droit chemin… L’homosexualité est un pêché ! ‘Tu ne coucheras point avec un homme comme on couche avec une femme. C’est une abomination.’ Je dois vous sauver… »
Aucun mot ne peut décrire l’horreur qu’eut à subir Nikita pendant l’heure qui suivit. Elle hurla et se débâtit tant qu’elle put, mais rien ne fut suffisant pour repousser son agresseur. Elle fut rouée de coups, littéralement passée à tabac. Et lorsqu’enfin elle cessa de lutter et de crier, au bord de l’inconscience et vidée de toute énergie, le calvaire commença. Ses vêtements en lambeau furent rapidement arrachés. Par ‘chance’, il ne pouvait la violer, ayant fait vœu d’abstinence. Mais il la toucha. A de nombreuses reprises. Pendant des minutes qui paraissaient être des heures et qu’elle baignait dans son propre sang, incapable de se dégager. Il la souilla. La bousilla de l’extérieur comme de l’intérieur. Et puis il se releva et la regarda une dernière fois.
« La volonté de Dieu est faite. »
Nikita ne fut retrouvée qu’une heure plus tard par une infirmière, alors qu’elle avait enfin sombré dans l’inconscience. Elle avait perdu plusieurs litres de sang et avait plusieurs fractures ouvertes. Mais elle avait survécu. Dans de telles circonstances, elle bénéficia d’un congé à durée indéterminée, et fut suivie de très près par un psychiatre pour l’aider à surpasser le traumatisme. Mais le mal était fait…
uprising
L’inactivité. Il n’y avait rien de pire pour cette accro au travail. Elle passait ses journées dans son appartement lugubre, avec pour seule compagnie celle de son chaton et d’Elijah, qui passait aussi souvent que son boulot le lui permettait. Nikita refusait de voir qui que ce soit d’autre, et ne sortait de chez elle que pour voir son thérapeute. Mais cette période de vide absolu, intérieur comme extérieur, ne pouvait plus durer. Elle devait dépasser le traumatisme, se remettre en selle aussi vite que possible. Ses plaies commençaient à cicatriser, et ses plâtres lui permettaient assez de mobilité pour se déplacer sans risquer d’aggraver ses fractures. Après seulement deux semaines d’absence, elle décida donc de reprendre le chemin de l’hôpital. Elle y découvrit un tout nouveau système de sécurité, et un personnel particulièrement à cran. L’agression n’avait pas touché qu’elle mais bien tout le corps de l’établissement, qui fit d’ailleurs tout pour soutenir la jeune femme alors qu’elle reprenait le boulot. Même Iris la serra dans ses bras, c’est dire ! Ce contact physique tant attendu aurait dû la ravir, mais fut au contraire totalement révulsant : c’était ainsi, depuis son agression, Nikita ne supportait plus d’être touchée. Mais elle travaillait dur avec son psy pour vaincre ce problème. Elle sortait doucement mais surement d’une phase de dépression : elle refusait désormais de se faire traiter en victime, car elle était avant tout une survivante. Dès lors, elle devait prendre des résolutions, et décida d’opérer des changements radicaux dans sa vie. Elle n’avait plus de temps à perdre, la vie était courte – elle le savait mieux que quiconque. Il était grand temps pour elle de trouver l’amour – et un amour réciproque tant qu’à faire ! Elle souhaite plus que tout combler cette sensation de vide, et veut former une famille. Et quoi de mieux qu’avoir un enfant pour ne plus être seule au monde ? Son thérapeute ne cesse de lui répéter qu’il s’agit d’une conséquence de son stress post-traumatique, mais peu lui importe : maintenant qu’elle s’est mise l’idée en tête, on ne la lui enlèvera plus. La prochaine étape ? Convaincre Elijah d’avoir cet enfant avec elle…