JOHAN C. LAURENT
J'errais dans les coulisses, attendant que se soi mon tour. J'étais prêt pour les impressionner, j'étais prêt pour leur montrer ce que je valais. S'il m'avait engagé, c'était bien pour faire plaisir. J'en avais eu des compliments sur mon physique mais jamais je n'aurais cru qu'il me servirait autant.
« C'est à toi dans une minute, Johan. » Je me levais de mon siège pour me préparer. Je n'avais plus qu'à attendre que l'on m'annonce et que la musique se lance pour faire mon apparition sur scène. J'étais le petit nouveau dans la troupe. Je n'avais que 23 ans et j'étais novice dans tout ce système. J'espérais simplement faire de l'effet. D'après ce que j'avais entendu de la hiérarchie, j'avais fais mon grand effet sur le grand patron. Mais le public était sans aucun doute le plus difficile à se mettre dans la poche. Enfin façon de parler... Car il n'y avait pas vraiment de poche dans ce que je faisais.
« Mesdames, soyez prête à accueillir ce soir une chair bien fraîche qui nous arrive tout droit de l'archipel d’Hawaï. Préparez vos billets et admirez Johan ! » Derrière, j'entendais les applaudissements. Le stress grimpait.
Toxic de Britney Spears se lança et sans comprendre ce qu'il m'arrivait je me retrouvais sur scène au milieu de toutes ces dames. Je jetais un œil derrière moi et tous me poussaient à aller de l'avant. Perdu, je commençais par bouger au rythme de la musique, me déhanchant au son de Britney Spears.
« Vas-y, mon beau ! Montre-nous ce que tu sais faire ! » Hurla une cliente. D'autres criaient de joie. Je souris. J'avais de plus en plus confiance en moi. Je commençais donc par descendre la fermeture de mon haut en cuir, jusqu'à laisser apparaître mon torse. Je le retirais rapidement, révélant mon corps à ces femmes en chaleur. Toujours sur le rythme de la chanson, je m’exhibais comme jamais je ne l'avais fais, dansant comme jamais je ne le faisais et provoquant la foule par des mouvements peu catholiques. Je retirais le bouton de mon pantalon lui aussi en cuir avant de descendre la braguette. Je me retournais et tirais rapidement dessus pour me retrouver en simple sous-vêtement devant mon public qui hurlait.
« Viens par là ! » Je m'approchais alors des femmes, tout en remuant chaque partie de mon corps sur la chanson qui m'enivrait. Un billet fut posé entre l'élastique de mon sous-vêtement et ma peau. Je reçus même une tape sur la fesse gauche. Je fis même le tour de la salle en petite tenue pour récolter le maximum d'argent. Ma vie se résumerait maintenant à danser. Danser et me déshabiller sous le regard de belles jeunes femmes ou de beaux mâles que j'aurais peut-être la joie de retrouver plus tard sous mes draps.
Nous étions dans mon appartement. J'avais eu de gros doute quand à toute cette histoire qui n'était pas normale. Ma vie entière n'était pas normale et je ne désirais pas entrer dans un moule. Je voulais vivre ma vie. Peu importe les conséquences. Je voulais être heureux. Je les avais appelé tous les deux. Deux hommes auxquels je tenais énormément et j'avais fais un choix. Un choix important pour le reste de notre vie. Nikolas était arrivé en premier, suivi de près par Andreas. Souriant, je repensais à nos rencontres respectives. Nikolas avait été dans un premier temps mon supérieur. Il était le grand patron sur qui j'avais fait un grand effet lors de mon embauche de sa boîte de strip-tease. J'étais vite tombé sous son charme également. Mais compte tenu de ma position et de la sienne, je n'avais jamais rien tenté. Ses regards insistants sur mon postérieur lorsque je le croissais étaient pourtant révélateur. Cependant, je préférais rester sur mes gardes et résister à cette tentation pourtant si alléchante. C'est à ce moment qu'Andreas fit son apparition. Lui était plus jeune que moi contrairement à Nikolas. Il avait la fraîcheur de vivre. C'était un aventurier dans l'âme, un homme vivant au jour le jour sans le moindre problème. Il exerçait le même métier que moi et nous nous retrouvions souvent dans les coulisses. J'étais vite tombé sous son charme également et le grand patron l'avait vite remarqué. Deux hommes complètement différents étaient entrés dans ma vie. Je les acceptais tous les deux et je terminais même par sortir avec les deux, contrairement à mes principes. Chacun ignorait l'existence de l'autre et c'était préférable. Mais la vérité n'est jamais bien loin et lorsqu'ils apprirent qu'ils n'étaient pas seul, tous deux m'ont demandé de choisir. C'est pourquoi nous nous retrouvions, ici, dans mon duplex après des rendez-vous en tête à tête et des soirées à deux. J'avais pesé le pour et le contre de chacun des deux hommes et la conclusion était simplement surprenante.
Tous les trois assis chez moi sur mon canapé, je m'étais installé entre les deux homme de ma vie. Je regardais premièrement Nikolas, le premier que j'avais rencontré.
« Je t'aime. » Lui dis-je en lui caressant la joue. Je me retournais vers Andreas.
« Et je t'aime aussi. » Lui révélais-je également avec une caresse sur sa cuisse.
« Je ne peux pas choisir entre vous deux. Je suis désolé. » Je les regardais l'un après l'autre de façon répétitive.
« Je vous prends tous les deux ou je vous laisse ensemble. Le choix est trop difficile car... Je te veux toi. » J'embrassais Andreas.
« Et je te veux toi aussi. » J'embrassais Nikolas également. Former un tricouple était la solution à notre problème à tous les trois. C'était ma solution pour nous trois, pour que je ne perde aucun d'eux.
« Je sais que ce n'est surement pas facile à avaler. Mais je vous laisse le temps d'y réfléchir. J'espère seulement que vous comprendrez pourquoi je fais ça... » Je posais mon regard sur Nikolas, puis sur Andreas. C'était indéniable, je ne pouvais pas les perdre. Je ne voulais pas les voir disparaître de ma vie.
« Je vous aime tous les deux. »Je dormais paisiblement dans mon lit, seul. Nikolas était parti pour une raison que j'ignorais - il aimait garder un certain mystère autour de lui - et Andreas avait dû s'absenter très tôt ce matin pour se rendre à la remise des diplôme de son frère cadet. J'étais donc seul dans l'appartement, dans notre grand appartement que nous partagions à trois depuis que mes deux hommes avaient réfléchi et décidé de me suivre dans ma solution de former ce tricouple hors du commun. Le choix du cœur avait parlé et depuis c'était un bonheur de partager ma vie avec eux deux. Je me réveillais donc sans eux à mes côtés, profitant de l'espace de ce grand lit pour moi tout seul. En douceur, j'ouvris les yeux. 10 heures passées. Je me retournais pour attraper mon pantalon de pyjama. Ayant pris l'habitude de dormir nu, j'avais toujours un caleçon ou mon pantalon de pyjama au pied de lit pour l'heure du réveil. Je me levais finalement du bon pied, profitant d'un moment calme et de solitude pour ne penser qu'à moi et mes envies. Lorsque soudain, l'alarme retentit. Les sirènes des pompiers ne tardèrent pas à faire leur apparition également. Fenêtre ouverte, j'entendais les cris des gens dans la rue. J'aperçus alors une grande fumée noire et interceptais des cris dans les escaliers, me révélant alors l'importance de tout ça. Une fuite de gaz accompagné d'un incendie. C'était mauvais signe. Je courus en direction du dressing. Un jean et un simple tee-shirt ferait l'affaire. De toute manière, je n'avais pas le temps. J'attrapais au passage ma veste et je quittais le duplex sans même refermer derrière moi. Je descendais à toute vitesse les escaliers, tentant d'appeler Nikolas ou Andreas en vain.
« Putain, décrochez !! » Personne. J'arrivais au 1er étage lorsqu'une explosion retentit juste devant et m'expulsa contre le mur opposé que je traversais avant d’atterrir, tête la première, contre une marche. J'étais maintenant inconscient.
« Où suis-je ? Qu'est-ce que je fais là ? Qui êtes-vous ? Comment je m'appelle ? » Je venais à peine de me réveiller à l'hôpital après une neurochirurgie. Apparemment, j'avais eu quelques dommages au cerveau qui avait pour conséquence une perte de mémoire partielle. Je ne savais plus qui j'étais, ni ce que je faisais ici. Le médecin répondit sans broncher à toutes mes questions et j'appris que j'avais été victime d'un accident dans mon immeuble.
« Connaissez-vous un Johan Laurent ? » Je regardais mon médecin, un neurochirurgien, avec insistance. Johan Laurent. Johan Laurent. Johan Calvin Laurent.
« Johan Laurent. Oui, ça me dit quelque chose. Je, je crois que c'est mon nom. » Finis-je par dire. Et c'était juste.
« Ne vous inquiétez pas pour votre mémoire. Elle reviendra au fur et à mesure. Il se pourrait que certains souvenirs soient complètement perdu mais il semblerait que, dans votre état, la plupart revienne à 80%. » Je lui souris. Allongé sur mon lit d'hôpital, je suivis du regard le docteur qui quitta alors ma chambre. Je soupirais. J'avais oublié tellement de chose que je ne savais par où commencer. Maintenant que je me souvenais de mon nom, d'autres questions me venaient en tête et j'espérais que bientôt je pourrais y répondre.
Cela faisait maintenant une semaine que j'étais sorti de l'hôpital et que j'essayais de me souvenir de mon passé à Zagreb. Grâce à mes séances avec le psychologues, j'arrivais à retrouver quelques brides de mémoire. Je me souvenais de mes parents, de leur décès, de Paris, d'Hawaï et de mon arrivée, ici, à Zagreb. Le reste était encore flou. Je ne me rappelais pas de ma vie dans la capitale croate. Comment avais-je pu vivre ici ? Quel métier exerçais-je ? Comment mon compte en banque pouvait-il être aussi bien rempli ? Vivais-je seul ou en couple ? Beaucoup d'interrogations me tournait dans la tête et pour le moment, je n'avais personne pour m'aider à y voir clair. Je reprenais peu à peu ma vie en main, retrouvant des noms, des lieux, des scènes importantes au fil des jours et des séances quotidiennes avec le psy. J'avais hâte que tout cela se termine et que je puisse enfin parler de cet évènement tragique au passé. Seul le temps me guérirait. Le temps était mon unique et seul ami.